PICOLO Albert, Joseph, Justin.

 

Né le 4 octobre 1899 à Batna (Algérie), mort le 4 août 1975 à Perpignan (Pyrénées-Orientales) ; professeur adjoint de physique et de chimie au lycée de Carcassonne (Aude) ; militant du Parti socialiste SFIO puis du PCF ; chef départemental du mouvement Combat dans l’Aude ; résistant en Lozère ; déporté en Allemagne ; conseiller général dans l’Aude.

 

Albert Picolo était le fils de Jules Picolo, peintre à Batna devenu entrepreneur de peinture à Constantine, et d’Émilie, Jeanne, Thérèse Pico. Albert Picolo fut surveillant d’internat au lycée Bugeaud à Alger en 1918 puis répétiteur au lycée de Constantine en 1921. Il vint alors en métropole et occupa diverses fonctions : répétiteur au collège de Castelsarrasin (Tarn-et-Garonne) en 1921-1922, maître d’internat au lycée de Toulouse (Haute-Garonne) de 1922 à 1927, répétiteur à nouveau au collège de Condom (Gers) en 1927-1928. Il retourna au lycée de Constantine comme répétiteur en 1928-1929, avant d’être titularisé comme professeur adjoint au collège de Bizerte (Tunisie) en 1928-1929. Il rentra en France et obtint un congé entre 1930 et 1934 qu’il passa à Saint-Germain-en-Laye (Seine-et-Oise). Il retrouva un poste de professeur adjoint de physique et de chimie au lycée de Carcassonne (Aude) en 1934 et l’occupa jusqu’à la guerre. Picolo était en 1936 secrétaire de la section socialiste SFIO de Carcassonne. Il créa, avec Maurice Demons*, une section du comité de vigilance des intellectuels antifascistes. Candidat aux élections législatives de 1936 dans la circonscription de Carcassonne, il obtint 5 623 voix sur 23 157 inscrits. L’analyse des résultats montrait qu’il avait légèrement fait progresser les suffrages socialistes au détriment des radicaux, en comparaison de 1932, mais que l’électorat traditionnel, en échange, s’était quelque peu effrité au profit des communistes. Pour le second tour, il se désista pour le docteur Henri Gout, dont les sympathies pour le Front populaire étaient certaines et qui, résistant de la première heure, fut un de ses compagnons de lutte clandestine.

Picolo se maria le 2 septembre 1925 à Castelnau-Magnoac (Hautes-Pyrénées)avec Odette, Angèle, Justine Bastiment, pharmacienne, (Castelnau-Magnoac, 1er janvier 1904 – Perpignan le 4 février 1984). Le couple eut deux garçons, nés à Constantine et à Saint-Germain-en-Laye. Picolo fut relevé de ses fonctions par le gouvernement de Vichy le 10 février 1941 et mis d’office à la retraite le 10 mai de la même année. Toutefois il n’était sans doute pas franc maçon car son nom ne figure pas dans le dossier global établi par les services de police pour l’ensemble de l’Aude ; il ne figure pas, non plus dans le, sous-dossier, très complet, des enseignants francs maçons. « Homme déterminé » (Lucien Maury), Albert Picolo fut un des premiers résistants de Carcassonne. Il fut contacté par Jacques Renouvin qui, depuis Montpellier, organisait le mouvement « Combat » dans la R3. Lucien Roubaud, son collègue au lycée de la ville et résistant lui-même, a pu écrire à son propos que le choix de Jacques Renouvin « ne s’explique pas seulement par sa hardiesse naturelle. Il pensait qu’il fallait ne pas attendre et stimuler la Résistance, fut-ce en se sacrifiant. C’est dans cet esprit qu’il arracha, en pleine rue Courtejaire, le bouquet que des collaborateurs serviles allaient offrir à un propagandiste nazi [Grim, venu faire une conférence pro-nazie à Carcassonne]. Il se désignait ainsi à la police. Albert Picolo assura donc la diffusion clandestine de Combat. Il recevait les exemplaires du journal par paquets de cinq à vingt-cinq kilos étiquetés comme des produits pharmaceutiques à l’adresse de la pharmacie de sa femme, avenue Brunau-Varilla. Il mit en place des structures qui permirent de diffuser des tracts. Le recrutement étoffa l’implantation du mouvement dont le développement permit la création du NAP et de l’Action ouvrière, branche de « Combat » qui réussit à s’implanter parmi les mineurs de Salsigne. Le 14 juillet 1941, il décora la vitrine de l’officine de sa femme avec un grand "V" tricolore. Albert Picolo fut l’organisateur de la manifestation du 14 juillet 1942 à Carcassonne devant la statue de Barbès à laquelle participèrent 2000 à 3000 personnes (évaluation de Lucien Maury) parmi lesquelles de nombreuses personnalités (le député Henri Gout, le sénateur Georges Bruguier* et son fils André Bruguier*, René Nelli*) qui furent prises à partie par le SOL. Le 13 juillet, Albert Picolo fut arrêté peu de temps avant Gout et Bruguier père. André Bruguier succéda à Picolo à la tête de « Combat » dans l’Aude. Le tribunal militaire de Montpellier relâcha Picolo à la fin de l’été 1942. Mais ne pouvant plus agir dans l’Aude, il quitta le département et s’installa en Lozère.

À Langogne, il devint le responsable de l’AS. Convoqué à une réunion des cadres de l’AS de Lozère à Marvejols le 30 août 1943 à 21 h, et présidée par Henri Cordesse* alias « Robert ». Picolo, étant à Mende, ne put être prévenu. Son adjoint, un agent de la police allemande, ancien journaliste à Montpellier le fut à sa place. La Gestapo, interrompant la réunion de l’AS put capturer la plupart de ses membres. Picolo fut arrêté à son retour à Langogne. Comme ses compagnons d’infortune il fut transféré à la villa des Rosiers au siège de la Siecherheitspolizei de Montpellier où il fut torturé. Déporté à Buchenwald puis à Flossenbürg (matricule 31267), Albert Picolo quitta Compiègne par le convoi du 23 octobre 1943. À Buchenwald, il retrouva plusieurs déportés des Pyrénées-Orientales et de l’Aude. L’un d’eux, Charles Lespinasse*, ancien compagnon de résistance, qui réussit à prendre des notes pendant don séjour au camp a pu écrire à son propos : "Picolo, 46 ans, licencié de mathématiques à Carcassonne. Ne s’est fait connaître que comme pharmacien" (En fait Lespinasse confondait Picolo et sa femme, pharmacienne). Il s’évada de Flossenbürg lors de l’évacuation du camp décidée le 20 avril 1945 et fut en contact avec les Alliés à Schwandorf le 23 avril 1945, date où fut également libéré le camp de Flossenbürg.

Lors des premières élections cantonales après la Libération, le 30 septembre 1945, il fut élu conseiller général de Carcassonne-Ouest. Au premier tour, le 23 septembre, il recueillit 4719 suffrages, face à Soum (SFIO), 2999 voix et Raymond (radical), 2692 voix au second tour, seul candidat en lice il fut facilement élu avec 6524 voix. Très favorable à l’union des forces de gauche, il figura sur la liste présentée aux élections à la constituante d’octobre 1945 par le « Mouvement unifié de la Renaissance française » et le Parti communiste. (liste intitulée d’Union républicaine et résistante pour le renaissance de la France). Il y figurait en deuxième position derrière Joseph Cerny* (de Narbonne). Quatre sièges étaient à pourvoir Deux revinrent à la SFIO (Georges Guille* et Marius Lacroix*) et un au MRP (abbé Albert Gau). Picolo quitta peu de temps après l’Aude pour la Drôme où il était en 1946 inspecteur de la Jeunesse et des Sports et militait au PCF. Il fut nommé chef du service départemental de la Jeunesse et des Sports dans les Pyrénées-Orientales en 1946. Il obtint une retraite pour invalidité en 1954. Dans les dernières années de sa vie, Albert Picolo habitait passage de l’Université, dans la ville nouvelle du Moulin à Vent de Perpignan. Il mourut à l’hôpital de Perpignan.

 

SOURCES : Arch. dép. Aude, 2 M 79 ; 107 W 253 ; 26 W 10. — Arch. com de Perpignan, état civil, acte de décès d’Albert Picolo. — Les Audois, Dictionnaire biographique, Association des amis des Archives de l’Aude, FAOL, Carcassonne, 1990, notice "Picolo Albert" par Rémy Cazals, p. 265. — Henri Cordesse, Histoire de la Résistance en Lozère, 1940-1944, Montpellier, Les Presses du Languedoc, 3e édition, 1999, 285 p. [p. 67, 71, 72]. — Robert Debant, DBMOF, 36, 1990, p. 343. — Charles Lespinasse, Quinze mois à Buchenwald, manuscrit inédit, bibliothèque municipale de Carcassonne. — Lucien Maury, La Résistance audoise, tome I, Carcassonne, 1980, Comité d’Histoire de la Résistance du département de l’Aude, 451 p. [pp. 52-55, avec des extraits du témoignage écrit de Lucien Roubaud]. — Site de la FMD, Livre Mémorial consulté le 3 mars 2012. — Notes de Jacques Girault, 8 mars 2012 et de Paul Tirand, 8 mars et 4 avril 2012.

 

André BALENT